Montpellier : l’extrême-droite à la manœuvre derrière l’annulation de la subvention à SOS Méditerranée ?

Elian Barascud Publié le 22 mai 2024 à 18:52 (mis à jour le 23 mai 2024 à 10:22)
L'Association de soutien aux lanceurs d'alerte (Asla) a été fondée par des militants de Génération Identitaire, groupuscule dissous, et entame régulièrement des procédures juridiques contre les subventions allouées à SOS Méditerranée. Sur la photo on voit leur stand lors d'un évènement organisé par le parti Reconquête près de Lyon en juillet 2023. (Capture d'écran du compte Instagram de l'Asla).

Le Conseil d’État a invalidé le 13 mai dernier l’octroi d’une subvention de la Ville de Montpellier à l’association SOS Méditerranée, jugée trop imprécise. Sur son site Internet, l’association de soutien aux lanceurs d’alertes (Asla), une association d’extrême-droite, crie victoire, après avoir aidé “un contribuable montpelliérain” à faire des recours pour annuler cette subvention. Ce contribuable n’est autre qu’un ancien cadre du groupuscule dissous Génération Identitaire

Le 13 mai dernier, le Conseil D’État avait à trancher sur la validité de subventions accordées par la mairie de Paris (100 000 €), le Département de l’Hérault (20 000 €),et la commune de Montpellier (15 000 €), à SOS Méditerranée, association d’aide au sauvetage en mer des migrants.

Sur le fond, il s’agissait pour le Conseil d’État de décider si une association pouvait toucher des subventions venant de collectivités territoriales malgré ses positions politiques, avec l’enjeu de devoir respecter la politique internationale de la France, en l’occurrence, celle sur l’immigration.

Dans un communiqué daté du 13 mai, le Conseil d’État a rappelé que “la loi permet aux collectivités territoriales de soutenir toute action internationale d’aide humanitaire qui respecte les engagements internationaux de la France et n’interfère pas avec la politique internationale conduite par l’État”, et a précisé que “les collectivités territoriales ne sauraient, toutefois, prendre parti dans un conflit de nature politique. Elles doivent toujours s’assurer que leurs subventions financent uniquement des activités humanitaires”.

Si le juge a considéré que que l’activité de sauvetage de SOS Méditerranée est humanitaire et non politique et que les subventions venant de la Ville de Paris et du Département de l’Hérault ont été validées, la subvention de la Ville de Montpellier a quant à elle été retoquée car jugée trop “imprécise”. L’avocat de SOS Méditerranée, Me Patrice Spinosi, commentait dans Midi Libre : Si la situation de Montpellier fait exception c’est uniquement pour des raisons purement formelles liée à la rédaction de la convention qui pourront être aisément corrigées.”

Les identitaires crient victoire

Quelques jours après le rendu de la décision, l’Association de soutien aux lanceurs d’alerte (Asla), une association fondée par des militants identitaires, criait victoire sur son site Internet, en parlant de SOS Méditerranée comme d’une “ONG d’extrême-gauche” qui “a encouragé et facilité l’invasion migratoire de l’Europe”. L’Asla revendique avoir contribué à l’annulation de la subvention Montpelliéraine par le biais de recours juridiques : “L’Association de Soutien aux Lanceurs d’Alerte a toujours été en première ligne pour dénoncer les subventions publiques accordées à cette organisation politique sous couvert d’humanitaire et ainsi défendre les intérêts des contribuables français devant le Conseil d’État. Un contribuable montpelliérain avait vu sa demande d’annulation d’une subvention de 15 000 euros accordée par la ville à SOS Méditerranée refusée en première instance et en appel. L’Asla l’a accompagné dans le recours et le travail de nos avocats a payé !”

Nos confrères de Streetpress évoquaient déjà l’Asla en octobre dernier : fondée par des anciens militants du groupuscule d’extrême-droite dissous Génération Identitaire, l’association a pour but, selon le média, “de défendre des prétendus lanceurs d’alerte, mais seulement ceux qui s’attaquent aux migrants ou à l’islam. Sa définition de lanceurs d’alerte peut se résumer ainsi : militants identitaires ou nationalistes auteurs d’actions spectaculaires, organisateurs de manifestations interdites ou accusés de diffamation ou d’incitation à la haine. Sur les 16 procédures mises en avant sur le site internet de l’association, 12 sont liées à Génération identitaire, pré ou post-dissolution.”

Et ce n’est pas la première fois que l’Asla s’en prend à SOS Méditerranée. En mars 2023 déjà, l’association avait aidé Antoine Oziol de Pignol, un ancien de Génération identitaire et proche du Gud (Groupe union défense, un groupuscule national-révolutionnaire parisien) à réaliser une procédure contre la mairie de Paris pour faire annuler une subvention accordée à l’ONG. Elle a également soutenu un toulousain dans une démarche similaire, et d’autres tentatives d’attaques juridiques de ce type ont été signalées à Lyon, Marseille, Grenoble ou Nantes.

Johan Salacroup, militant connu

A Montpellier, le “contribuable” que l’Asla revendique avoir aidé dans sa demande d’annulation est en réalité un ancien militant identitaire bien connu. Selon nos informations, il s’agit de Johan Salacroup dit Teissier.

Johan Salacroup, ancien membre de Génération Identitaire, avait été condamné en octobre 2022 à un an de prison avec sursis pour “violences en réunion et de participation à un groupement en vue de la préparation de violences”, après avoir attaqué le siège de SOS Méditerranée à Marseille en 2018. Il a également été condamné à quatre mois de prison avec sursis pour “provocation publique à la haine” en février 2023 à la suite de tweets haineux écrits à l’encontre du recteur de la grande mosquée de Lyon.

Contactée, l’Asla n’a pas donné suite à nos sollicitations.

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