Montpellier : une épée de Damoclès sur le foyer de migrants d’Euromédecine

Le Poing Publié le 4 novembre 2019 à 18:44
Verdict attendu le 2 décembre, dans les procédures à l’encontre de l’un des squats sociaux les plus solides et peuplés de Montpellier.

Qui n’est pas habitué à fréquenter les prétoires n’imagine pas à quel point le langage juridique est déconnecté de la réalité des situations vécues. Donc de la politique, au sens le plus musclé du terme. L’association Solidarité partagée révèle cela à sa façon, lorsqu’elle provoque la venue au tribunal de quatre-vingts migrants subsahariens. Ils étaient là, brandissant le slogan « La justice ou la rue », devant le tribunal de grande instance de Montpellier ce lundi 4 novembre au matin.

Puis ils garnirent la salle d’audience où Samuel, responsable de l’association, et son avocat, étaient confrontés à celui de l’Institut Bouisson-Bertrand, qui se définit comme une fondation « à vocation humanitaire ». Ces demandeurs d’asile présents logent, depuis huit mois à présent, dans un ancien centre de recherche appartenant à cet institut, mais de longue date vide de toute activité, dans le quartier Euromédecine. L’actualité leur faisait plus de place lorsqu’ils étaient installés, l’année dernière, au lieu-dit Le Château, tout près de la gare, donc en vue du centre ville.

Ce bâtiment était infect. À L’inverse, le site d’Euromédecine, aves ses cent cinquante résidents, ses mille cinq cents mètres carrés occupables, ses chambres fermées, son équipement globalement moderne, son vaste terrain désormais voué au maraîchage, paraît l’un des centres sociaux d’hébergement réquisitionnés parmi les mieux consolidés de la ville. Ses occupants confient volontiers qu’ils y trouvent un sas où souffler, reprendre un bon bout de leur vie en main, quand dehors ils frayent dans les dédales kafkaïens de leurs demandes de régularisation.

L’enjeu de l’affrontement judiciaire en cours est donc la destruction de cet acquis, le retour à la rue, si est mise à exécution l’expulsion à laquelle avait conclu le tribunal en février dernier, au terme d’un délai de six mois pour la recherche d’une solution alternative. À ceci près que c’est à l’État que la loi fait obligation d’assurer pareille prise en charge. Non à des militants bénévoles, qui risquent, avec les résidents, de voir s’effondrer l’acquis de ce lieu, et devoir tout reprendre à zéro, avec des personnes très fragilisées.

Demande est donc faite d’un nouveau délai d’un an, accompagné d’une garantie de respect de la trêve hivernale. À l’inverse, l’avocat de Bouisson-Bertrand réclame exécution immédiate de l’expulsion, récupération de 600 euros d’indemnité mensuelle précédemment fixée par le tribunal (quand l’urgence des bénévoles est d’assurer la fourniture quotidienne de repas), le remboursement de la facture d’électricité activée du fait de la présence de résidents (12 000 euros environ) et une sanction pour être restés dans les lieux au-delà des six mois accordés.

Rendu du jugement annoncé pour le 2 décembre. Les nombreux migrants présents ont suivi l’audience dans un calme absolu. Des CRS avaient néanmoins pris place dans le hall du palais de justice. On remarqua comment certains de ces policiers s’auto-accordaient le droit de fumer dans ces locaux. On ne sait s’ils se laissent ainsi gagner par un esprit anarchiste, ou tiennent à signifier à quel point ils se sentent dorénavant au-dessus des lois, jusqu’à bafouer la moindre réglementation civique commune…

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