“Nous ne sommes plus vos pions” : les assistants d’éducation en grève ce 1er décembre
Précaires, sous-payés, méprisés, les « pions » portent bien leur nom, mais cela pourrait bien changer. Les assistants d’éducation (AED) seront en grève un peu partout en France ce 1er décembre. Dans l’Hérault, le collectif Vie S’Colère 34 organise la bataille.
Créé en 2003 pour remplacer les maîtres d’internat et surveillants d’externat, le statut d’AED est incontestablement précaire. Ils sont recrutés, la plupart du temps, pour une durée d’un an renouvelable, et ne peuvent exercer plus de six années d’affilée, sans perspective à la clé. Quelque soit leur ancienneté, ils sont payés au SMIC, avec un temps de travail annualisé. Placés de fait sous l’autorité hiérarchique du conseiller principal d’éducation (CPE), ils endossent de multiples casquettes – surveillant, confident, infirmier, éducateur, prof, etc – sans formation adéquate.
Souvent tutoyés par les élèves, ils connaissent mieux que quiconque les problèmes de la cour. Sans eux, aucun établissement ne peut tourner plus d’une heure. Autrefois pensé comme un job étudiant, le profil des AED est en réalité diversifié, mais ils sont toujours considérés par les directions comme une main d’œuvre corvéable, serviable et taiseuse.
Un silence brisé par le collectif Vie S’Colère 34, créé il y a peu : « Alors que les vies scolaires fonctionnent déjà à flux tendu, le contexte sanitaire et sécuritaire a mis plus en lumière notre précarité, cantonnant notre travail à de la pure surveillance […], au détriment de notre mission d’accompagnement éducatif ». L’un de ses membres nous décrit des situations kafkaïennes : « On nous demande de mettre un maximum d’élèves dehors pour éviter la formation d’un cluster, et dans le même temps, d’en mettre un maximum à l’intérieur pour les protéger du terrorisme… On a vu des élèves parqués entre des barrières dans la cour. On nous a demandé de faire remonter la liste des profs grévistes, de repérer les élèves “antirépublicains” pendant l’hommage à Samuel Paty… C’est tout simplement scandaleux… Et la direction profite de cette confusion pour changer nos emplois du temps tout le temps, au dernier moment. »
Des professeurs s’étaient bien mobilisés à Montpellier, fin septembre et début novembre, pour dénoncer l’impossibilité de respecter le protocole sanitaire, mais les AED, ne bénéficiant pas de puissantes corporations syndicales, n’ont pas eu l’opportunité de formuler leurs propres revendications.
C’est désormais chose faite. Ils revendiquent leur titularisation, un plan massif d’embauche, la gratuité des repas, la suppression des jours de carence en cas de maladie, la clarification de leur mission éducative, l’attribution des primes données aux autres personnels de l’Éducation nationale, l’augmentation des salaires et la baisse du temps de travail (un temps plein équivaut à 40 heures par semaine).
Une caisse de solidarité, hébergée par le syndicat Sud Éducation 34, s’est montée, et plusieurs rassemblements sont prévus ce 1er décembre : à 13 heures devant la sous-préfecture de Béziers, et à 14 heures devant le rectorat de Montpellier (une délégation sera reçue par la rectrice), suivi d’une assemblée générale. Une trentaine d’établissements devraient être touchés par la mobilisation à Montpellier, et certaine vies scolaires devraient même fermer. Affaire à suivre.
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