“Une décision politique” : À Montpellier, l’association AREA voit ses financements supprimés par l’État

Elian Barascud Publié le 26 novembre 2025 à 17:04 (mis à jour le 26 novembre 2025 à 17:25)
La direction de l'association AREA a donné une conférence de presse ce mercredi 26 octobre pour dénoncer l'arrêt des financements alloués par l’État. "Le Poing"

Ce mercredi 26 novembre, le conseil d’administration de l’association humanitaire AREA, qui accompagne les personnes sans logement fixe, a organisé une conférence de presse pour dénoncer l’arrêt de ses financements accordés par l’État à cause de son rapport “critique” vis-à-vis des institutions. La structure va fermer ses portes fin décembre

“C’est une décapitation brutale”, affirme José Lagorce, président de l’association AREA. Depuis dix ans, celle-ci accompagne les personnes vivant dans les bidonville de Montpellier. Une action qui prendra fin en décembre faute de renouvellement de financements par la préfecture de l’Hérault. En janvier, ce seront donc près de 400 personnes suivies par l’association qui se retrouveront sans accompagnement. Un appel à candidatures devait être lancé en octobre pour reprendre l’activité de l’association, en liquidation judiciaire, mais rien n’a été publié à ce jour. “Les financements de l’État représentent six postes sur les dix que compte l’association, et la perte du financement principal entraîne l’arrêt des autres subventions liées à la mission”, détaille Catherine Vassaux, fondatrice d’AREA.

Une décision “politique”

Dans un courrier daté du 30 septembre, la Direction Départementale de l’emploi du travail et des solidarités (DDETS) reproche à l’association de se positionner “dans une posture critique des institutions à des fixns d’amelioration continue de l’accompagnement des personnes”. “Cette posture a emmené à plusieurs reprises mes équipes à s’opposer à vos positions, depuis plusieurs années, tout en acceptant de continuer à financer la mission d’accompagnement au vu de vos résultats”, écrit la DDETS.

En outre, les services de l’État désapprouvent la grève menée par les salariés d’AREA le 28 août dernier pour s’opposer aux expulsions menées dans un bidonville avenue de Maurin. Une décision “politique” selon Catherine Vassaux, qui déplore “des sanctions administratives” qui se généralisent contre les associations jugées “trop critiques” par l’État.

“Dix ans de tensions”

“L’État dit de nous qu’on est critique de l’institution alors qu’on rappelle juste le droit pour faire évoluer des situations face à des dispositifs créés par des gens de plus en plus éloignés du terrain”, se défend la direction d’AREA, qui revendique une “déontologie” dans l’exercice du travail social. “Dix ans de tensions permanentes”, résume José Lagorce. Il évoque notamment le principe l’inconditionnalité de l’accueil en centre d’hébergement et de réinsertion sociale qui n’aurait pas été respecté après l’expulsion du bidonville avenue de Maurin. “Des gens se sont vu refuser une place car ils étaient en situation irrégulière”, affirme le directeur de l’association, “ce qui est contraire au droit et que nos équipes ont souligné”.

Lequel fustige aussi le système de “liste” de recensement avec date butoir des occupants des bidonvilles imposé par la préfecture (passée la date butoir, les personnes arrivées après le recensement n’auront pas forcément de relogement au moment de l’expulsion). De même pour la question d’un terrain de travail à mettre à disposition pour des activités de recyclage, qui était en débat ces derniers mois avec les autorités. “On ne leur permet pas de faire de l’économie de subsistance, et derrière ,des discours politiques déplorent une stagnation dans l’assistanat”, souffle José Lagorce.

Contexte de coupes budgétaires

Antoine, salarié de l’association et membre de la coordination du social contre les coupes budgétaires, analyse cette liquidation judiciaire comme un symptôme des politiques d’austérité qui touchent actuellement le secteur du travail social à l’échelle nationale. “On nous dit que la décision est politique, mais notre grève et la réaction de la DDETS n’est qu’un prétexte pour faire des économies dans notre secteur.” Il déplore également le fait qu’une partie des habitants du bidonvilles de Maurin en ont reconstruit un autre après l’expulsion “Et on n’est même pas allé les voir pour connaître leurs besoins”, souffle-t-il.

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