Décrochage de portraits de Macron : un militant écolo au tribunal pour une composition pénale

Le Poing Publié le 25 juin 2020 à 15:13 (mis à jour le 25 juin 2020 à 15:27)
Crédit photo : ANV COP 21 Montpellier

Lewis, militant écologiste et gilet jaune, passait ce mercredi 24 juin au Tribunal de Grande Instance de Montpellier, pour une proposition de composition pénale en lien avec une action pacifique de décrochage de portait présidentiel à la mairie d’Assas, qui remonte à juillet 2019. Plusieurs dizaines de soutiens étaient présents devant le TGI. Mais qu’est ce que la composition pénale, quels enjeux en termes de justice se dessinent derrière le recours à ce type de procédure ?

Perquisitionné, saisi et gardé à vue pour une action pacifique…

Le lundi 15 juillet 2019, une quinzaine de militants du groupe ANV-COP21 s’introduit dans la mairie d’Assas, petit village au nord de Montpellier, avec une banderole « Climat, justice sociale, décrochons Macron ». L’action, symbolique, vise à décrocher le portrait du chef de l’État de cette marie, et s’inscrit dans une campagne nationale de happenings similaires.

Le mercredi 17, Lewis est arrêté à son domicile, puis placé en garde à vue à la gendarmerie de Clapiers pour « vol en réunion ». La police saisi son ordinateur et son téléphone.  Après vingt neuf heures de garde à vue, il est libéré sans convocation. A plusieurs reprises des groupes de soutien se retrouvent devant la gendarmerie en question, dont des militants écolos, de la France insoumise et des gilets jaunes. À la demande du procureur de la République de Montpellier, ces soutiens ont subi des contrôles d’identité.

La composition pénale favorise une justice à deux vitesses !

La composition pénale est la proposition d’une sanction par le procureur de la République à l’auteur présumé  d’une infraction, pour éviter un procès. Elle peut être utilisée pour les infractions ou délits de faible gravité, passibles d’une peine inférieure ou égale à cinq ans d’emprisonnement. Le procureur doit agir avant la convocation devant le tribunal. Si l’auteur accepte la peine, l’accord est validé automatiquement ou, au-delà d’un seuil, par le tribunal. S’il ne reconnaît pas sa culpabilité ou n’accepte pas sa peine, c’est au tour du Parquet de prendre une décision : aller au procès, ou bien opter pour l’abandon de la procédure.

Si la procédure peut-être refusée par la personne incriminée, l’existence de celle-ci favorise selon le syndicat de la Magistrature, par un effet « d’appel d’air », la réponse pénale à des micro-délits, tout en participant à l’engorgement judiciaire au détriment du traitement d’autres dossiers, souvent délaissés dans les tribunaux et les commissariats, comme ceux qui ont trait à la délinquance économique et financière. Quand on sait que la composition est beaucoup utilisée pour des affaires bénignes de stupéfiants, ou comme avec Lewis pour traiter la contestation pacifique, on ne peut s’empêcher de penser à  une justice de classe : priorité va au fait de punir plus systématiquement les gens du commun pour un oui ou pour un non, pendant que le traitement d’une délinquance bourgeoise en pâti…

Le militant refuse la composition pénale

Lewis a refusé la proposition de composition pénale qui lui a été faite : le procureur lui a proposé une amende de 300 euros, assortie de l’obligation de rembourser le portrait décroché. Le Parquet va donc décider de son côté de donner suite ou pas à ce dossier, en allant au procès. Et le matériel saisi au militant lui sera rendu quand le dossier sera déclaré clos.

Quant à savoir quelle sera la décision du Parquet de Montpellier, difficile de savoir. Malgré le côté très symbolique de ces actions de décrochage, les procureurs semblent chercher des sanctions systématiques pour ce crime de lèse-majesté…  A titre d’exemple, deux militants qui avaient été relaxés en septembre 2019 pour une action similaire par le tribunal correctionnel de Lyon ont été condamnés à payer des amendes au mois de janvier 2020, après que le Parquet ait fait appel de cette décision…

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