Delafosse de nouveau épinglé sur la laïcité
Dans un communiqué du 14 juin, l’association la libre pensée accuse Michaël Delafosse, le maire de Montpellier d’avoir voté une subvention pour les fêtes chrétiennes de l’église Saint-Roch. Une décision contraire à la loi de 1905 de séparation de l’Église et de l’État selon l’association, qui entend déposer un recours au tribunal administratif.
L’affaire court depuis la mandature Saurel. Au début de l’été 2017, l’association Montpelliéraine de La Libre pensée (dont le combat laïc est l’objet principal depuis le dix-neuvième siècle) alertait déjà la préfecture par courrier à propos de « doutes sur la légalité de la subvention accordée par la mairie de Montpellier à l’association internationale Saint Roch ».
Née en 1995, l’association « est ouverte à tous ceux concernés par saint Roch de Montpellier, quelle que soit leur motivation : Pour son message évangélique, l’exemple qu’il est pour l’homme contemporain, la place qu’il a occupé au Moyen Âge, celle qu’il occupe aujourd’hui en tant que saint patron des pèlerins » peut-on lire sur le site internet de l’association. Elle est également à l’origine de l’organisation de la fête de la Saint Roch, dont le programme tourne autour des messes, des sorties de messes et de la promotion du « tourisme cultuel ». La libre pensée avait alors rappelé l’article 2 de la loi de 1905 : « La République ne reconnaît, ne salarie ni ne subventionne aucun culte ». Réponse d’une représentante de la préfecture à l’époque : « Allez voir du côté du culte musulman ».
« Séparatismes » à géométrie variable
Mais sous Delafosse, l’histoire prend d’autres tournures. Déjà, parce que pour la première fois cette année, la subvention accordée à l’église Saint-Roch n’a pas été votée à l’unanimité comme les fois précédentes (Alenka Doulain et Clothilde Ollier s’étant abstenues). Mais surtout, le shériff « socialiste » Montpelliérain avait déjà été rappelé à l’ordre en septembre dernier par La Libre Pensée et la Ligue des droits de l’Homme. En plein projet de loi contre les séparatismes, Delafosse, qui soutenait ce projet, y a apporté une déclinaison locale : sa fameuse charte de la laïcité (ce qui valut entre autres à Delafosse, la sympathie du très à droite journal Valeurs Actuelles dans un article). Cette Charte soumet l’accès à des subventions municipales à un critère de respect de certaines règles et usages censés découler des principes de la laïcité (tel que le respect de l’égalité hommes-femmes, le maintien des activités religieuses à l’écart des activités associatives, etc.)
Un texte critiqué par la La Libre Pensée dans nos colonnes le 22 septembre 2020 : « La loi de 1905 dispose l’obligation faite à l’État d’observer une totale neutralité sur le plan de la religion. Celle-ci est renvoyée au cadre strictement privé, chaque citoyen étant libre de ses croyances, de la pratique d’un culte, ou pas. Outre le fait d’être une grave entorse à cette liberté de conscience et d’expression fondamentale, le choix d’imposer l’adhésion à une Charte de laïcité de façon autoritaire constitue un renversement total des fondements de cette loi ».
Plusieurs associations comme La ligue des droits de l’Homme de Montpellier avaient refusé de signer cette charte, au motif que « cette démarche, en raison du contexte politique actuel, comporte le risque de conduire à de nouvelles formes de stigmatisation et à des discriminations à l’encontre de nos concitoyennes et nos concitoyens de confession musulmane ».
Avec cette nouvelle subvention allouée aux activités de l’église Saint-Roch, Delafosse bafoue lui-même sa propre charte et montre une nouvelle fois sa vision de la laïcité à deux vitesses. Mais à la mairie, on ne l’entend pas de cette oreille. Dans son communiqué, La Libre Pensée compare l’argumentaire avancé par la municipalité à celui de Robert Ménard : « il s’agit de culture ! Autre argument : cela attire le tourisme ! Exactement les mêmes arguments que ceux de l’ancien maire Philippe Saurel ! ». Fait cocasse, qui a de quoi faire tourner au ridicule les activités « culturelles et touristiques » autour du présumé « Saint Patron de Montpellier » : la Gazette, pourtant au chevet du pouvoir Montpelliérain et de ses assises depuis des années, a récemment révélé que Saint Roch n’avait jamais existé, la fin d’un mythe !
La Libre Pensée a annoncé qu’elle allait rédiger un recours au tribunal administratif. Ses militants s’appuient sur un arrêt du Conseil d’État du 15 février 2013, qui avait jugé que la subvention aux ostensions de Limoges était illégale.
Alors que les débats parlementaires sur le projet de loi confortant les principes de la République et de lutte contre les séparatismes reprendront le 28 juin, l’association entend également interpeller les députés sur cette situation Montpelliéraine qui dure depuis des années. « Puisque vous allez discuter des principes Républicains, que faire des cas comme Delafosse ? », résume l’un des membres de la Libre Pensée, contacté par téléphone par la rédaction du Poing.
Comme on le disait plus tôt dans la semaine à propos de la police des transports, avec Delafosse, le « socialisme » à un drôle de goût. Un goût pour l’ordre, aux relents islamophobes. Bref, un « socialisme » sauce Darmanin.
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