Foot à Montpellier : d’autres horizons sur les gazons

Le Poing Publié le 24 avril 2024 à 22:06 (mis à jour le 25 avril 2024 à 06:37)
La section féminine du club de foot des Arceaux est née du départ d'une vingtaine de joueuses d'un autre club, énervées contre leur entraîneur. Crédit photo : Mathieu Le Coz

Pour les dix ans d’anniversaire du Football du Peuple, Le Poing republie cet article, initialement publié dans le numéro 40 du Poing (dossier central sur le sport), imprimé en mars 2024.

La journée anniversaire du Foot du Peuple, initialement prévue ce samedi 27 avril au stade du Père Prévost à Montpellier, est finalement reportée au 18 mai à cause de la météo. Tenez vous informé.es sur les réseaux sociaux du Football du Peuple (Facebook et Instagram)

Au club des Arceaux, les sections de foot féminin ouvertes récemment font un véritable carton. Pendant qu’au stade du Père Prévost on tente de se débarrasser de l’esprit de compét’ avec le Football du Peuple.

La scène n’est pas des plus courantes. Sur la pelouse synthétique du terrain de foot de la Cité Astruc, une vingtaine de gamines, tenues de sport enfilées, tapent le ballon, sous le regard de Marion. Elle qui arbitre les matchs d’exercice des jeunes du club des Arceaux âgées de 13 à 15 ans, passe vite joueuse, tout en continuant à assurer son rôle d’entraîneuse.

Depuis un an, le club de foot des Arceaux propose plusieurs sections féminines, de 8 ans à l’âge adulte. Fin de l’entraînement. On rejoint les locaux. « Ici on accepte les joueuses quel que soit leur niveau de départ, il n’y a pas de sélection comme dans les équipes féminines de l’ASPTT Montpellier, où un certain nombre de joueuses envisagent des carrières professionnelles », explique Jean-Philippe Bacou, président du Club depuis 2013.

Marion souligne le succès de la formule : « En moins d’un an on a rassemblé une centaine de joueuses. On a pour les compétitions adultes, une équipe à huit, une autre à onze. En plus de celles des jeunes, qui se démerdent très bien. »

Dans la pièce est affichée une charte de féminisation des rangs du club, à côté de l’agrément du Label Qualité FFF, à laquelle le Club est affilié, pour l’École de foot, notamment féminin, que la structure propose.

« Pouvoir jouer, tout simplement »

Tout est parti d’un groupe de joueuses qui ont rejoint ensemble le Club des Arceaux. « On a quitté la section féminine du club de Lunaret à une vingtaine pour venir ici », se souvient Audrey, capitaine de l’équipe à huit pour adultes. « Il y avait beaucoup de problèmes entre l’entraîneur et les joueuses, et le club a préféré le soutenir, donc on a mis les voiles. »

Très vite le groupe grossit, se diversifie. Notamment chez les plus jeunes. « Les jeunes joueuses ou leur famille en ont parlé à des connaissances. Ça répond à une vraie attente. », commente Hélène.

Dans les clubs, les filles se voient séparées des garçons à huit ou neuf ans. « Jouer dans une équipe féminine, c’est pouvoir jouer, tout simplement. », rappelle Audrey.

« L’autre avantage de la non-mixité, c’est qu’on y est plus tranquilles pour la progression. Beaucoup d’entre nous on commencé le foot sur le tard, là où les mecs sont très habitués à jouer depuis leur plus jeune âge, dans la cour d’école.», analyse Élisa, une joueuse de l’équipe adulte à onze.

Une tendance en train d’évoluer selon Marie. « Le foot féminin se développe de plus en plus, peut-être parce que c’est de plus en plus diffusé à la télé », observe la capitaine. Mais le foot féminin continue d’être moins visible que son homologue masculin. Au niveau pro, l’impressionnant palmarès de l’équipe féminine de l’Olympique Lyonnais, avec quatorze titres consécutifs de championnes de France entre 2007 et 2020 et huit titres de championnes d’Europe entre 2011 et 2022, aurait valu à n’importe quelle équipe masculine une réputation de légende.

Au Foot du Peuple, sport et solidarité

Au Stade du Père Prévost, pour l’entraînement du Foot du Peuple, on joue en mixité. Plutôt théorique, puisque la seule femme présente régulièrement joue au milieu d’une trentaine de bonhommes.

Le Foot du Peuple n’est pas un club. Lancé en 2014 par des étudiant·es de Paul Valéry inspiré·es par un voyage à Athènes et la découverte des activités sociales des antifascistes grecs, l’association promeut un foot accessible à tout le monde, sans discrimination ni comportement violent. On y recherche une désescalade de la compétition, une solidarité marquée avec les débutant.es. Les matchs y sont auto-arbitrés et l’action collective valorisée plus que le jeu individuel. Le slogan : « Le plus beau but est une passe. »

« Ici, on a pas d’inscription formalisée, les gens viennent jouer quand ils veulent, pendant l’un des deux rendez-vous qu’on propose dans la semaine. Il n’y a pas non plus d’obligation d’assiduité », nous explique Mathieu.

Ce qui aura permis par le passé à de nombreuses personnes étrangères de participer, sans tracas administratifs et sans entraves liées à la précarité. Des liens importants seront créés et maintenus pendant de nombreuses années avec le collectif Migrants Bienvenue 34.

« Tout est gratuit, même si les gens peuvent donner au volontariat. On se finance principalement par la vente de nos maillots, produits dans une coopérative militante en Espagne, la Lokomotora », reprend Mathieu.

Au début de l’aventure, un projet immobilier porté par le promoteur Pragma, sur l’emplacement du stade Prévost, validé par la maire Hélène Mandroux, et son adjoint à l’urbanisme de l’époque, un certain Michaël Delafosse, mis en échec à la faveur des municipales de 2014. Sous la pression de certaines assos implantées dans le quartier, dont le Foot du Peuple.

Depuis, le réseau de l’association ne cesse d’évoluer, au gré des liens tissés par les uns et les autres. « C’est par le bouche à oreille, par des amis, que j’ai entendu parler de groupe de joueurs », se rappelle un joueur présent, maillot du Foot du Peuple vissé au corps. « Depuis je viens très souvent. » Un autre participant fait lui sa première séance. Tout juste arrivé sur Montpellier, lassé du jeu en club, avec toute la pression et l’agressivité liée à la compétition, c’est par le réseau militant de gauche et d’extrême-gauche qu’il a eu vent de l’initiative.

Au rang des projets, l’asso lorgne du côté de l’organisation d’un tournoi local des groupes de football alternatifs, éventuellement avec le concours de l’Asteras Montpellier, et compte bien fêter ses dix ans le 27 avril prochain.

Le Foot du Peuple propose deux rendez-vous par semaine, toujours au stade Prévost, le jeudi à 18h et le dimanche à 15h. Consultez leurs réseaux sociaux (Facebook ou Instagram) pour être prévenu.es en cas d’annulation.

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