Grève de la faim au foyer Adoma : « L’inadmissible pousse à l’extrême »

Le Poing Publié le 10 novembre 2020 à 09:45
Rassemblement pour Sébastien devant le foyer Adoma

Une cinquantaine de personnes sont venues apporter leur soutien à Sébastien, militant du droit au logement, qui a cessé de s’alimenter depuis une semaine

Visiblement très affaibli, Sébastien Allary est également apparu très ému, au moment de prendre la parole ce lundi 9 novembre à 19 heures, devant le foyer Adoma de l’avenue du Père Soulas. Il y réside depuis deux ans. Il a cessé de s’alimenter depuis déjà huit jours. « Voir l’inadmissible, ça rend malade, et finalement ça pousse à l’extrême » s’est-il exclamé, après avoir exposé la catastrophe du mal-logement à Montpellier, et pointé du doigt des situations en cours, comme celles de familles à la rue, dormant avec leur marmaille dans des voitures, sans qu’aucune solution ne soit apportée.

Une cinquantaine de personnes s’étaient réunies autour de lui depuis une heure. Dont un fort noyau de membres de l’association Droit au logement, dont il est lui-même militant. L’initiative de ce mouvement de soutien leur revenait. C’était très important, car Sébastien Allary doit faire comprendre que, si c’est bien son cas personnel qui est devenu lourdement conflictuel, en fait « [sa] situation s’explique par le contexte social global. Je ne vis que ce que des milliers d’autres vivent dans cette ville. Mon sort personnel relève complètement du collectif ».

Il a notamment dénoncé « la situation insupportable faite aux résidents de ce foyer, abandonnés depuis des années dans des conditions de totale vétusté, d’insalubrité, et qu’on s’apprête à déménager aux limites les plus lointaines de la ville, en leur imposant un loyer équivalant à celui du privé. Cela, on le fait parce qu’il s’agit de noirs, d’arabes, de vieux et de pauvres ». Un syndicaliste, travailleur social, est alors intervenu, pour raconter comment, « dans une ville où l’immobilier est à des prix exhorbitants, rendant infernal le problème de l’accès au logement des plus démunis », il avait pu se réjouir de parvenir à loger une personne en difficulté au Foyer Adoma. Bilan des courses : « Après y avoir vécu, et vu ce que c’était, cette personne a préféré retourner à la rue ».

La députée France insoumise Muriel Ressiguier s’était jointe au rassemblement. Elle a pu s’entretenir avec le délégué régional de l’Adoma – dont l’action la plus remarquable, sans cela, avait été de placer des vigiles en travers de la porte d’accès au foyer. Selon la parlementaire, une réunion de concertation serait possible dans des délais très rapprochés, impliquant mairie et préfecture, de manière à trouver une solution de logement pour Sébastien Allary, conforme à ce que nécessite son état de santé, invalidant.

D’un point de vue tactique, cela desserrerait la forme de confrontation infernale en tête à tête survenue entre la structure Adoma et son résident indocile. Même de façon biaisée, le militant du droit au logement serait fondé à y voir la démonstration que la lutte paye. Son entourage en serait soulagé, alors que l’inquiétude y était très vive, compte tenu de sa grande fragilité physique, et de la difficulté à rebondir sur un acte de lutte inspiré par l’exaspération, comme désespéré, dans le contexte rendu encore plus éprouvant, insuffisamment préparé et accompagné, avec l’isolement qu’entraîne le confinement.

Parmi les prises de paroles de ce lundi soir, il faudra retenir celle du représentant de la Cimade. L’orateur a fort justement placé le préfet de l’Hérault devant ses responsabilités plus générales en matière d’errance à la rue des plus démunis. La folle politique du représentant de l’État aura été, ces mois derniers, de vider les squats, y compris certains parmi les plus stabilisés, jetant des dizaines de personnes, dont des familles entières à la rue.

On notera le cynisme qui consiste à anéantir d’un claquement de doigt le travail immense des bénévoles qui s’y employaient, non sans que l’administration se soit appuyé presque officiellement sur eux pour pallier sa propre incurie au moment du premier confinement. Enfin, une splendide clairvoyance ressort de cette chasse aux plus pauvres, puisqu’aujourd’hui, avec le nouveau confinement, les circulaires gouvernementales exigent que strictement personne ne dorme dans la rue. Oui mais à Montpellier, Monsieur le Préfet a systématiquement fait en sorte que telle soit la situation, lamentable, traduisant une stupéfiante irresponsabilité de la puissance publique.  

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