Montpellier : festive, la manif anti-pass poursuit sa décrue

Le Poing Publié le 24 octobre 2021 à 18:30

Dans une ambiance pleine de joie et de bonne humeur, la manif contre le pass sanitaire et l’obligation vaccinale aura réunie environ un millier de personnes à Montpellier ce samedi 23 octobre. Le mouvement poursuit sa lente décrue dans les rues de la ville.


Une dynamique en suspend…


Après une manifestation largement dynamisée par les appels à la reprise des ronds-points par les gilets jaunes le 16 octobre, la sauce semblait un peu retombée ce samedi 23 dans les rues de Montpellier. Un millier de personne ont à nouveau manifesté leur opposition au pass sanitaire et à la vaccination obligatoire. Festif, plein de chants et de bonne humeur, le défilé n’a pas pour autant joué les prolongations : après son habituel tour de centre-ville, la dispersion arrive bien vite sur la Place de la Comédie, sur fond de danses.

Le groupe de musique “HK et les saltimbanks”, qui accompagne régulièrement les luttes sociales et écologiques de ces dernières années, est très nettement à l’honneur. Les autres références et symboles arborés sont toujours aussi hétéroclites et étonnants : de grandes banderoles mêlant rhétorique peace and love, new âge et nationalisme agressif, on passe aux revendications des gilets jaunes, du Près d’Arènes ou d’ailleurs, et aux pancartes déplorant l’état des services publics. Sans oublier des marques de soutien au Pr. Denis Agret, représentatif d’un courant covido-sceptique qui n’hésite plus à passer aux menaces envers les soignants “collabos”, et les salutaires pancartes s’inquiétant d’une faillite des valeurs démocratiques.
Doit-on conclure à une adhésion plus forte qu’auparavant de la population à la politique, plus sécuritaire que sanitaire, du gouvernement Macron ? Pas si sûr. Selon les chiffres du ministère de l’Intérieur -la source vaut ce qu’elle vaut- le nombre de personnes dans la rue ce 23 octobre se stabilise autour de 40 000 personnes. Sans que cela nous permette de distinguer la dynamique anti-pass, jusque là déclinante, de la dynamique “gilets jaunes”, qui discrètement monte dans la région. Les comptages du Nombre Jaune, nettement plus fiables et qui permettent le distinguo, ne sont pas encore achevés. Ajoutons qu’autour de midi, au rond-point réoccupé près du magasin de moto Macadam de Saint-Jean de Védas, de nombreux gilets jaunes opposants au pass ne comptaient pas se rendre en manif, déplorant des défilés inoffensifs et stériles, sans perspectives.


… mais qui n’est pas encore éteinte


Même si localement la tendance est à la décrue, l’opposition au pass et à l’obligation vaccinale n’est pas morte. Sur Montpellier, les terrasses sauvages, qui permettent à tout un chacun de partager un repas ou un jus de fruit, continuent à avoir lieu. Notons toutefois que les tensions autour de RéinfoCovid, un réseau diffusant des contre-vérités sur l’épidémie et servant de facto de vitrine à l’extrême-droite qui a maintenant déserté les terrasses sauvages , ont dissuadé nombre de participants.
Ailleurs dans le pays, le collectif des Mamans Louves, entre défense de la liberté vaccinale et inquiétude sur les risques psycho-sociaux encourus par les enfants qui portent le masque, appelle le 4 novembre à un rassemblement devant l’Elysée pour y exiger l’ouverture d’un débat public.
Florian Philippot, patron du parti d’extrême-droite Les Patriotes, va toujours plus loin dans son entreprise de récupération du mouvement : un appel à s’inscrire pour se rendre disponible pour des blocages pacifiques, sur le modèle italien, tourne beaucoup sur le net. Et provoque de vifs débats, bien au-delà des cercles de sympathisants du politicien : faut-il le snober, par hostilité aux politiques et/ou par rejet des valeurs fascisantes qu’il promeut, ou doit-on renforcer toutes les actions qui de facto viendraient planter une épine dans le pied du gouvernement Macron ?
Passant outre la radicale indépendance du mouvement, Florian Philippot avait déjà tenté de déposer une marque “gilets jaunes” à l’approche des élections européennes de 2019. Juste après avoir quitté le Rassemblement National, dont le référent en terme de sécurité, Bruno Attal, secrétaire du syndicat France Police En Colère, lui aussi opposé au pass, réclamait la même année le droit de tirer à balles réelles sur les manifestants. “Liberté, liberté.”
Pour la première fois depuis des mois, Les Patriotes n’ont appelé officiellement à aucune manifestation sur Paris le 23 octobre.
Notons que beaucoup de gilets jaunes qui réinvestissent les ronds-points contre la hausse du prix de la vie revendiquent aussi l’abrogation du pass sanitaire et de l’obligation vaccinale. Avec tout un dégradé de hiérarchie entre ces deux types de revendications, très variable selon les groupes locaux et les sensibilités individuelles.


Des victoires arrachées par collectifs et syndicats… dans les DOM-TOM


C’est certainement dans les départements et territoires d’Outre-Mer que le mouvement contre l’obligation vaccinale arrache le plus de succès, mené par associations et syndicats.
L’Union Générale des Travailleurs de Guadeloupe (UGTG), et notamment sa fédération Santé, se saisit à bras le corps des protestations. Ces derniers jours plusieurs établissements de santé de Grande et Basse-Terre ont été bloqués, et les manifs continuent à faire carton plein.
Plusieurs syndicats et associations de Nouvelle-Calédonie, rejoints par des responsables coutumiers kanaks, ont obtenu le report de l’obligation vaccinale des secteurs sensibles au 31 décembre. Des négociations sont en cours pour déterminer la suite de la politique qui s’appliquera en 2023. Parmi les méthodes utilisées sur l’île, grèves, manifs, et blocages en tout genre.
En Martinique, les soignants du CHU non-vaccinés ont obtenu leur réintégration, après un refus massif de l’injection, de nombreuses manifs et blocages. Précisons que l’île est aussi secouée par les protestations sur le coup de l’essence, avec de nombreuses stations services à sec la semaine dernière suite aux blocages de raffineries.
Malgré sa décrue, le mouvement métropolitain saura-t-il retrouver un second souffle en s’inspirant des méthodes mises en œuvre avec succès ailleurs ?

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