Montpellier : le logo de France Bleu Hérault utilisé contre son gré pour la pub d’un salon du bien-être ?
En mars dernier, Midi Libre s’était associé au salon du bien-être “Sésame” à Nîmes, avant de revenir sur son partenariat après la publication d’un article du Poing dévoilant le pedigree de certains intervenants. Quelques mois plus tard, c’est la radio France Bleu Hérault qui a vu son logo accolé à l’affiche d’un autre salon dont elle avait été partenaire l’an passé, alors qu‘elle n’avait pas donné son accord pour cette édition, tout en déplorant “le contenu de l’évènement”
On prend (presque) les mêmes et on recommence. Du 6 au 8 décembre prochain se tiendra le salon du bien-être “Bio Harmonie” à Pérols, organisé par l’agence Starcom. La même qui, au mois de mars 2024, avait organisé le “Salon Sésame” à Nîmes, un salon du bien-être avec lequel Midi Libre avait noué un partenariat, avant de revenir dessus à la suite d’un article du Poing dénonçant les relents complotistes ou d’extrême-droite de certains intervenants, pour certains surveillés par la Mission Interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (Miviludes).
Quelques mois plus tard, si Midi Libre semble avoir abandonné l’idée d’un contrat publicitaire, c’est au tour de France Bleu Hérault de voir son logo floqué sur l’affiche du salon Bio Harmonie, avec peu ou prou les mêmes intervenants qu’à Nîmes en mars dernier. La station avait déjà été partenaire de l’édition 2023 du salon Bio Harmonie de Montpellier, avec 34 spot publicitaires diffusées avant et pendant l’évènement. Mais cette fois, la radio n’avait pas signé de contrat avec l’agence Starcom : “L’agence sait clairement depuis plusieurs semaines que nous ne sommes plus partenaires. Une nouvelle demande a été faite de retirer le logo. Je fais le choix de ne pas renouveler pour des raisons éditoriales liées notamment au contenu du salon”, explique Phillippe Moity, directeur et responsable des programmes de France Bleu Hérault, interrogé par Le Poing. Ce vendredi 15 novembre, le logo de France Bleu Hérault a finalement été enlevé de l’affiche visible sur le site de l’organisateur du salon.
Médecin antivaxx, auteur réactionnaire…
On comprend le choix de France Bleu en lisant le programme du salon, entre les “géobiologues” (récemment au cœur d’une vidéo censurée du Youtubeur sceptique G Milgram), marchands “d’eau biodynamisée”, des cours sur les annales akashiques et sur la “Psycho-Bio-Acupressure”. Parmi les intervenants déjà présents au salon Sésame de Nîmes, on retrouve à nouveau le « maître Reiki » Jacques Martel. A l’origine électricien, Jacques Martel, a entrepris des recherches en « vitaminothérapie », s’est formé en développement personnel pour devenir « rebirtheur » et proposer des stages à 2 000 euros la semaine. C’est d’après ses « connaissances » qu’il a rédigé un ouvrage où il aborde cancer, sida, viol ou encore homosexualité. Il explique que ces « maladies » sont des « conflits intérieurs non résolus qui s’expriment dans le corps ». Son livre, Le grand dictionnaire des malaises et maladies, qui a pour ambition d’aborder la santé par le prisme des pensées, des sentiments et des émotions, avait été jugé homophobe au moment où la Fnac l’avait classé en « coup de coeur », en 2018. En effet, on peut y lire que l’homosexualité « peut être une étape dans la recherche de [son] identité ou un choix de vie pour [son] évolution ou pour faire évoluer la société », qu’une personne peut y « rechercher un père, une mère » ou encore que la « cause » de l’orientation homosexuelle peut être trouvée dans le caractère « trop dominant » d’une mère.
Le site de l’Union nationale des Associations de Défenses des Familles et de l’Individu victimes de sectes évoque d’autres passages du livre : « A propos du sida, il pointe “une problématique : la race noire”… Le harcèlement sexuel serait inconsciemment provoqué par la victime en “manque d’affection”. Toujours selon Jacques Martel, le cancer serait un “suicide déguisé” ou bien encore “une manifestation de la haine envers quelqu’un ou une situation” ».
Autre habitué de ces évènements, Christian Peronne. Infectiologue antivax connu pour ses prises de positions pro-Didier Raoult et pour avoir parlé du Covid comme un « complot mondial », il a été mis fin à ses fonctions de chef du service des maladies infectieuses et tropicales à l’hôpital Raymond-Poincaré à Garches (AP-HP), dans les Hauts-de-Seine, sur décision de Martin Hirsch, directeur général de l’AP-HP en décembre 2020. Christian Peronne est proche de France Soir, ancien média devenu relais de de fausses nouvelles pendant le Covid, du site « RéinfoCovid », animé entre autre par l’agitateur d’extrême-droite Louis Fouché, et du youtubeur conspirationniste Silviano Trotta.
Du côté des “thérapies”, on retrouve également Jacques Prunier, déjà intervenant lors du salon Sésame. Fabriquant d’un complément alimentaire à base d’algues, qui selon lui, peut soigner la maladie d’Alzheimer, la maladie de Parkinson ou l’amyotrophie spinale infantile, il dit s’inspirer lui des thèses du médecin Ryke Geerd Hamer, créateur de la « nouvelle médecine germanique », qui repose sur le postulat selon lequel tout cancer, et plus généralement toute maladie, résulte d’un choc psychologique intense. Le docteur Hamer est considéré comme responsable de la mort prématuré de 140 patients, en leur conseillant de ne pas faire de chimiothérapies. En 2012, le magazine « Sciences et Avenir » alertait déjà sur l’Association de Prévention pour la Santé par les Médecines Douces (APSAMED) donc Jacques Prunier était membre, qui, selon le média, servait à « camoufler des actes d’exercice illégal de la médecine ».
Jacques Prunier a attiré l’attention du Sénat, en 2013, lors d’une série d’auditions sur les dérives thérapeutiques et dérives sectaires. Olivier Hertel, journaliste de Sciences et Avenir, qui a écrit l’enquête cité ci-dessus, auditionné par le Sénat à ce titre, s’inquiétait d’une « infiltration » de ces thérapeutes dans les hôpitaux et universités.
Enfin, dernier exemple de cette liste non-exhaustive, Stella Giordanengo, qui pratique « l’alchimie gnostique » en se revendiquant de Rudolf Steiner, le créateur de l’anthroposophie. Mouvement spirituel et ésotérique fondé au début du XXe siècle par l’occultiste autrichien Rudolph Steinner, l’anthroposophie a fait l’objet de nombreuses saisines auprès de la Miviludes.
Contacté, Patrice Marty, l’organisateur du salon, a décliné notre demande d’entretien, étant “actuellement très pris par l’organisation de trois salons consécutifs”.
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