Une figure des gilets jaunes atteinte de sclérose en plaques dénonce “les lenteurs administratives” en matière de handicap
Kaina, gilet jaune montpelliéraine blessée par un tir de LBD dans la tête en manifestation, est atteinte de sclérose en plaques depuis un an. Elle a essuyé un refus d’Allocation Adulte Handicapé alors que son médecin l’a jugée “inapte au travail”. Elle et d’autres personnes concernées ont organisé une conférence de presse ce mercredi 10 avril devant la Maison départementale des personnes handicapées pour dénoncer les lenteurs administratives et le non-respect des droits des personnes en situation de handicap
C’est appuyée sur béquille qu’on la voit sortir péniblement du tramway. Kaina, figure montpélliéraine des gilets jaunes, connue pour avoir été blessée à la tête par un tir de LBD pendant une manifestation le 29 décembre 2018, s’est vue diagnostiquée une sclérose en plaques il y a un an.
“Mon médecin m’a qualifiée inapte au travail. C’est écrit en gros sur mon dossier médical. Mes jambes, ma vessie et mon œil droit sont paralysés. J’ai fais une demande d’Allocation adulte handicapée, j’ai attendu neuf mois, et on me l’a refusé car je n’avais pas fait de demande d’aide à domicile en amont. Mais moi, j’ai une famille et des proches qui peuvent m’aider au quotidien, je préfère que cette aide aille aux personnes seules qui n’ont pas d’entourage, vu le peu de postes d’aide à domicile ou d’auxiliaires de vie disponibles”, nous explique-t-elle en marchant vers la maison départementale des personnes handicapés, ou elle doit donner une conférence de presse pour dénoncer “les lenteurs administratives” et la “maltraitance” que subissent les personnes handicapées. “Là, je dois faire un recours mais c’est très long, et je suis en fin de droits pôle emploi. Ce que je ne comprends pas, c’est pourquoi on ne voit pas un médecin à la MDPH dans le cadre de l’examen d’une demande d’AAH.”
“Non respect des droits”
Car même malade, Kaina n’a pas perdu la combativité et l’énergie qui la caractérisent, et s’est coordonnée avec d’autres personnes en situation de handicap pour faire entendre leur quotidien. Domi, une personne en fauteuil roulant, dégaine un texte, lu par une autre femme présente. “Nous sommes là pour rappeler que déjà en 2019, madame Catalina Devandas Aguilar, Rapporteure spéciale de l’ONU au sujet de la France, a qualifié de mots très forts la politique du handicap menée par ce gouvernement : “Ségrégation, privation de libertés, non respects des droits”. […] Le 17 avril 2023, le Comité Européen des droits sociaux a rendu sa décision. Le comité conclut à la violation par la France de plusieurs articles de la Charte sociale européenne, notamment le manquement des autorités à adopter des mesures efficaces pour remédier aux problèmes d’accès insuffisant aux services d’aide sociale, aux bâtiments , installations, logements, et transports publics.”
Elle dénonce également “le manque de comptables à la maison départementale de l’autonomie” et “la prise en charge à domicile, désastreuse et laissée au bon vouloir de la CDAPH – commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées, DNLR -, qui statue du nombre d’heures accordées pour chaque dossier et des associations des auxiliaires de vie, parce que le salaire n’est pas attractif la plupart du temps.”
Peur du démantèlement de l’ALD
De plus, Kaina rejoint les craintes de 25 associations qui ont récemment adressé une lettre ouverte au ministre de la santé, concernant la potentielle réforme l’actuel dispositif de prise en charge des affections longues durée. En effet, fin février Frédéric Valletoux, ministre de la santé, expliquait à l’assemblée nationale, dans un contexte de déficit public à résorber, que “les affections longue durée concernent 20% de nos concitoyens, c’est-à-dire 13 millions de Français qui sont ainsi accompagnés dans leur pathologie. Cela représente les deux tiers des remboursements par l’Assurance maladie. Et donc, il n’est pas illégitime, ni illogique, comme cela a été fait régulièrement, d’interroger la pertinence de ces dispositifs.”
Actuellement, ces patients atteints de pathologies chroniques (Alzheimer, cancers, maladies rénales…) voient leurs frais de santé intégralement remboursés par la sécurité sociale, mais ont un reste à charge important, notamment via les dépassement d’honoraires ou les franchises médicales. “Aujourd’hui, on a peur que le gouvernement enlève certaines maladies de la liste”, explique Kaina, avant d’être reçue par la MDPH accompagnée son avocat. A la sortie, elle annonce qu’elle allait faire un recours devant la CDAPH.
De son côté, la Maison départementale des personnes handicapées a annoncé une réorganisation de ses protocoles fin mars, avec un nouvel outil qui permettrait de faciliter le traitement des dossiers et des recours. Quant à Kaina et ses camarades, ils envisagent l’idée de faire un cortège de travailleurs handicapés lors du premier mai à Montpellier pour visibiliser leur combat.
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