Le Château de Flaugergues, lieu de ralliement du commando d’extrême-droite de la fac de droit de Montpellier

Le Poing Publié le 9 octobre 2020 à 18:49

À la suite des récentes révélations du d’Oc et de Mediapart sur le renvoi en correctionnel du commando d’extrême droite du 22 mars 2018 à la fac de droit de Montpellier, Le Poing a cherché à en savoir plus sur le château de Flaugergues, où une partie des assaillants et de leurs complices assistaient à une réunion de la Manif’ pour tous avant de venir déloger violemment les étudiants en lutte contre la loi ORE. Quels liens entretient le chic domaine viticole Montpelliérain avec la Manif Pour Tous ? Comment les personnes qui étaient à cette réunion se sont retrouvé à la fac de droit le soir du 22 mars ? Enquête sur les connexions des droites Montpelliéraines.


D’une réunion anti-PMA à un commando cagoulé

« J’étais venu sur Montpellier boire des coups avec des amis ». Cette déclaration d’un des inculpés du commando du 22 mars est aujourd’hui contredite par le dossier judiciaire. Selon les enquêteurs, cinq personnes renvoyées en correctionnel dans l’affaire (sur sept) ont assisté à une réunion anti-PMA de la Manif pour tous au château de Flaugergues en début de soirée, avant de taper du poing à la faculté de droit pour casser du gauchiste.

Parmi eux Martial Roudier, membre de la Ligue du Midi (groupuscule identitaire raciste et homophobe, voir notre enquête ici), condamné en 2013 à quatre ans de prison dont deux avec sursis pour avoir poignardé dans le dos un adolescent antifasciste. Mais aussi Thierry V., militant de la Ligue du Midi et ancien militaire, Thierry P., aussi militant de la Ligue du Midi (l’homme au bonnet rouge et au taser sur les images), et Mathieu R., jouteur Sétois proche du Rassemblement national (l’homme corpulent qui tient la palette de bois).

Jordi Vives, pamphlétaire du journal d’extrême droite Lengadoc Info, véritable relais de la Ligue du Midi, est également indiqué comme étant présent à la réunion et autour de la faculté au moment des faits, mais n’a pas participé à l’expulsion violente de l’amphithéâtre.

Tous ont été informés du mouvement étudiant à la fac de droit par Patricia Margand, ancienne directrice de campagne de Myriam Fauch, candidate FN pour les législatives de 2017 à Sète et compagne du professeur d’histoire du droit Jean-Luc Coronel de Boissezon, lui aussi membre du commando et proche de la Ligue du Midi. Patricia Margand aurait rattrapé les militants d’extrême droite sur le parking du château de Flaugergues à la fin de la réunion, et envoyé un message à l’un d’eux déjà parti, pour leur demander d’aller à la fac, après être rentrée en contact téléphonique avec son compagnon, déjà présent sur les lieux. Peu après, la fine équipe s’est réunie près de l’arrêt de tram Louis Blanc avant de mener l’assaut.

Cette opération, en partie organisée depuis le château de Flaugergues, a donc joui des réseaux militants gravitant autour de la Manif Pour Tous, connue pour brasser plusieurs sensibilités de droite, des « cathos tradis » bourgeois aux identitaires païens ultra-violents. Une question demeure : que faisaient-ils dans un emblématique domaine viticole du Clapas ? Nous avons passé quelques coups de fils pour en savoir plus.

Le château de Flaugergues, carrefour des droites montpelliéraines ?

Ce domaine, situé dans le quartier du millénaire, est tenu par des héritiers de la famille Colbert (celle du conseiller de Louis XIV), connus pour être « notoirement de droite » d’après nos sources.
Contacté par la rédaction, M. d’Auzac , responsable de la manif pour tous Occitanie et membre de l’Association familiale catholique de Montpellier, admet qu’« il nous [la Manif Pour Tous] arrive de nous rencontrer au château de Flaugergues » car « les propriétaires du lieu sont proche de l’association familiale catholique ». Cependant il affirme ne pas faire le lien avec les événements du 22 mars et ne pas être au courant de ce qu’il s’est passé ce soir là.

Si Pierre de Colbert, gérant du château de Flaugergues, confirme quant à lui connaître monsieur d’Auzac par le biais de l’association familiale catholique de Montpellier, il nie cependant toute implication politique du château :

« Je ne voudrais pas m’exprimer sur le fait qu’on reçoive ou pas la Manif pour Tous ou autre mouvement, on a reçu différentes formations, nous avons accueilli le dépouillement de la primaire des verts au municipales, nous avons reçu l’équipe de campagne de Mohed Altrad, également Olaf Rokvam, candidat RN à la mairie de Montpellier… mais aussi Aurélie Filippetti, France Jamet (candidate RN aux législatives dans l’Hérault), Louis Alliot… On n’a pas à politiser notre action, on a un restaurant, on a une activité commerciale, et donc uniquement un lien commercial avec ces gens là ». L’argent n’a décidément pas d’odeur….

Il affirmera ensuite connaître Martial Roudier et Jordi Vives, « les identitaires », comme il les appelle, sans savoir s’ils se trouvaient au château le jour du 22 mars.

Si on ne peut pas affirmer que château de Flauguerges est un espace d’organisation régulier pour l’extrême droite, la présence de la Manif Pour Tous à cet endroit le 22 mars a clairement facilité l’organisation du commando cagoulé, puisqu’elle regroupe en son sein plusieurs sensibilités de droite n’hésitant pas à s’allier pour briser les mouvements sociaux.

Cette « porosité des droites » s’illustre ici à l’échelle locale et prend forme à l’échelle nationale, notamment avec la Manif pour Tous et Marion Maréchal Le Pen, via son école à Lyon (où Coronel de Boissezon s’est recyclé en tant qu’intervenant, ça ne s’invente pas) qui entend former les cadres de « la nouvelle droite » pour réunir les cathos tradis huppés aux idées identitaires profondément racistes. Rien de nouveau sous le soleil : les bourgeois préféraient Hitler au Front populaire, et ils en pincent désormais pour les identitaires.

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