Montpellier : 3000 manifestants contre la réforme des retraites, nasse d’une heure, une dizaine d’interpellés

Le Poing Publié le 12 décembre 2019 à 20:52 (mis à jour le 12 décembre 2019 à 21:13)
Ce jeudi 12 décembre, environ 3000 personnes se sont réunies place Zeus à Montpellier pour la troisième journée de mobilisation contre la réforme des retraites (contre 10 000 le 10 décembre et 30 000 le 5 décembre). Une marche tranquille, parfaitement millimétrée et encadrée par les appareils syndicaux, qui ont subitement plié boutique avec sono et camions à la gare, tandis que le cortège de tête, déterminé à continuer la manifestation, a subi une longue nasse policière avec fouilles, contrôles d’identité et interpellations ciblées. Retour sur une journée qui soulève une nouvelle fois les divergences entre syndicats et gilets jaunes dont nous parlions hier.

Tous derrière la CGT ?

Dans la matinée, les infatigables syndicalistes étudiants du SCUM ont de nouveau bloqué les bâtiments administratifs de la faculté Paul Valéry.


À 14h, le cortège prend forme place Zeus, la CGT en tête. Des gendarmes munis fusils d’assaut traînent dans les parages…


La manifestation démarre, direction les Aubes, où des gilets jaunes et des jeunes essaient de doubler les sonos syndicales et leur reprise punk de « El pueblo unido » pour former un cortège de tête un peu offensif. Bref, un beau moment de folklore. Aux abords du Corum, un syndicaliste prend la parole depuis son camion pour essayer d’appeler à une « convergence » : « Rouges, jaunes, verts, tous ensemble ! » Avec les effluves d’herbe saturant l’air ambiant, on pourrait presque se croire au Reggae Sun Ska ou autre festival dédié à la musique rasta tellement l’ambiance est pépère. Les grailles occitanes et autres tambours remplacent une énième reprise de l’Internationale interprétée par un obscur groupe de ska français à la tête de la manifestation, et le cortège arrive doucement à la gare.

Là, la manifestation se stoppe sous les yeux d’un nombre impressionnant de gendarmes, et petit à petit, le cortège scissionne. Deux salles, deux ambiances : à gauche direction du Guesclin, prises de paroles syndicales, applaudissements, poignées de mains ; à droite, les gilets jaunes trépignent, crient « grève, blocage, manif sauvage » et s’exécutent en tentant une remontée vers la Comédie. Qu’on se le dise, la fameuse « convergence » n’aura absolument pas eu lieu aujourd’hui.

Plus d’une heure de nasse

À peine engagé dans la rue Maguelone, l’embryon de manif’ sauvage se fait nasser par des gendarmes, accompagnés par la brigade anti-criminalité. Une scène qui a rappelé à beaucoup l’acte 52 des gilets jaunes, où la manifestation avait été totalement neutralisée par la police. Même configuration ce 10 décembre, sauf que cette fois-ci, les manifestants n’ont même pas pu aller se payer un grec pour patienter parce que la police nassait presque toute la rue. Pendant que l’équipe du Poing s’inquiète quant à l’éventuelle saisie de son matériel de protection, des gens se demandent ce que font les syndicats. La police procède à plusieurs interpellations (une petite dizaine), vraisemblablement ciblées. Deux joueurs de percussions, habitués des manifestations de gilets jaunes ont été interpellés. Des lycéens, actifs dans les blocages, ont été contrôlés (reconnus par le visionnage de photos sur les portables des policiers), dont le correspondant allemand d’un élève, et certains ont été arrêtés.

Une équipe de gendarmes est même rentrée dans un hall d’immeuble pour procéder à des contrôles.


De l’autre côté du rideau bleu sur-armé, le reste des manifestants ayant échappé à la nasse crie « libérez nos camarades ! ». Souhait exaucé par les parangons de la morale publique, après plus d’une heure d’attente et une sortie au compte-gouttes avec fouille et contrôle d’identité. Vers 18h, tout le monde est sorti, la police procède encore à une interpellation, et la plupart des contestataires, dépités, commencent à se demander où ils vont pouvoir aller boire un coup pour finir la journée.

Vous l’aurez compris, ce n’était pas la manif’ du siècle, mais ne perdons pas espoir pour autant.

Nouvelle manifestation mardi

Les annonces d’Édouard Philippe, à défaut d’enfumer, ont mis le feu aux poudres. Si le gouvernement a tenté de diviser la mobilisation en expliquant que la réforme ne serait appliquée qu’à ceux nés après 1975, celle-ci pourrait bien augmenter et durer dans le temps. Et pour cause, Laurent Berger, patron de la CFDT, syndicat pourtant Macron-compatiblen a déclaré hier « que la ligne rouge avait été franchie », et a appelé à la mobilisation mardi prochain, le 17 décembre (sans pour autant appeler à la grève…)

La journée de mardi sera donc un nouveau cap dans la lutte contre cette réforme des retraites, voire un point de basculement. Qui luttera verra !


Nos articles sont gratuits car nous pensons que la presse indépendante doit être accessible à toutes et tous. Pourtant, produire une information engagée et de qualité nécessite du temps et de l’argent, surtout quand on refuse d’être aux ordres de Bolloré et de ses amis… Pourvu que ça dure ! Ça tombe bien, ça ne tient qu’à vous :


ARTICLE SUIVANT :

Création très attendue d'un comité Droit au Logement (DAL) à Montpellier