Montpellier : les coursiers engagés s’organisent pour construire un rapport de forces

Elian Barascud Publié le 24 octobre 2023 à 13:49 (mis à jour le 1 décembre 2023 à 11:28)
Rassemblement de soutien aux livreurs verbalisés, le 6 février 2021 devant l'Hôtel de Ville de Montpellier

Le mouvement des coursiers engagés, qui regroupe des livreurs de différentes plateformes, dont Uber Eats et Deliveroo, appelle à un rassemblement le samedi 28 octobre à 15 heures sur la place de la Comédie, à Montpellier. Le Poing a rencontré Jason Legrux, président de la jeune association à l’origine de la mobilisation

Le Poing : Quand et comment l’association du mouvement des coursiers engagés a vu le jour ?

Jason Legrux : C’est une association locale qui est née en juin 2023, pour regrouper les livreurs des différentes plateformes dans l’Hérault. C’est une jeune association en cours de structuration, donc on recherche des bénévoles. Le but, c’est de se fédérer pour rentrer en négociations avec les plateformes pour lesquelles on travaille. Il existe d’autres associations de ce type en France, comme la maison des livreurs à Bordeaux ou les coursiers rennais. On a pris contact avec eux et on discute des suites à donner. On a déjà organisé plusieurs rassemblements, notamment à Béziers, pour se rencontrer, discuter, et aussi interpeller les gens sur nos conditions de travail. C’est le but du rassemblement de samedi, sur la place de la Comédie. On a créé une association, car comme nous sommes auto-entrepreneurs, c’était compliqué de monter un syndicat.

uelles sont vos revendications ?

On demande à ce que le matériel de travail soit fourni gratuitement par les plateformes. Aujourd’hui, quand vous commencez chez Uber Eats, vous devez acheter le sac, qui coûte entre 70 et 90 euros, et une veste floquée aux couleurs de l’entreprise, qui coûte 60 euros. De plus, on demande une revalorisation du prix des courses. Depuis six mois, Uber a baissé le montant des courses de 35 %. Avant, pour une course de sept kilomètres, on touchait un peu plus de six euros, maintenant c’est descendu à quatre euros. Pendant le covid, on était bien payés, et on avait des primes pour les intempéries ou la canicule, aujourd’hui on ne les a plus, donc on demande à ce qu’elles soient de nouveau actives. On demande également une paie de nuit.
Et puis il faut plus de sécurité au travail. Récemment, un livreur que je connais a eu un accident et il n’a pas été indemnisé par Uber. Pareil pour un collègue qui s’est fait agresser par un client, la plateforme n’a pas réagi. L’objectif, c’est d’avoir une reconnaissance légale. Beaucoup aimeraient être salariés, comme en Angleterre. Au moins, on pourrait cotiser pour le chômage et la retraite. Après, là dessus, on est un peu divisés, car certains aiment la flexibilité des horaires de l’auto-entreprenariat, et de pouvoir décider quand ils travaillent.
Enfin, il y a le problème de la sous-location des comptes. Les plateformes sont conscientes que cela sert à faire bosser des personnes sans-papiers, et on se doute bien que cela peut les arranger. Nous, on demande leur régularisation.

Comment se mobiliser quand on est indépendant et que la grève n’est pas un levier d’action évident, dans la mesure où les plateformes peuvent supprimer un compte en un clic ?

C’est vrai que la grève c’est compliqué. Ça s’est déjà vu, mais le statut d’auto-entrepreneur fait que c’est dur à organiser, et on risque de ne pas être assez nombreux. Il faut qu’on se structure pour construire un rapport de forces, et puis on va écrire aux différentes plateformes pour commencer des négociations. On peut imaginer des actions comme des rassemblements, ou des blocages…

Plus d’informations sur le site de l’association

Le Poing a publié plusieurs articles sur les livreurs en lutte à Montpellier, et la répression qu’ils subissent :
« Delafosse affiche son mépris pour les livreurs à scooter »
« Les soutiens aux livreurs verbalisés à la recherche de livreurs mobilisés »
« Montpellier : plus de 10 000 signatures contre les PV infligés aux livreurs par la police de Delafosse »
« Montpellier : une pétition contre les amendes infligées aux livreurs par la police de Delafosse »
« Uber, l’Etat et la pandémie : avant les vies, des profits à tout prix »

Plus d’informations sur le site de l’association : https://www.mouvementdescoursiers.org/

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