Procès mêlant extrême-droite et LDH : Jean-Jacques Gandini relaxé, un membre de la Ligue du Midi à la barre

Elian Barascud Publié le 7 décembre 2023 à 18:23

Des délibérés des affaires de diffamation jugées en septembre dernier à Montpellier sont tombés ce jeudi 7 décembre : l’avocat Jean-Jacques Gandini a été relaxé face à Alexandre Bellotti, ancien doctorant en droit, à propos du procès du commando de la faculté de Droit. Olivier Roudier, président du groupuscule la Ligue du Midi, comparaissait quant à lui pour injures sexistes

Le soulagement était palpable dans les rangs de la section héraultaise de la Ligue des droits de l’Homme, sur les bancs du tribunal d’Instance de Montpellier, ce jeudi 7 décembre. L’avocat Jean-Jacques Gandini, figure locale de la LDH, a été relaxé dans l’affaire de diffamation qui l’opposait à Alexandre Bellotti, ancien doctorant à la faculté de droit de Montpellier.

Ce dernier avait porté plainte le 30 juillet 2021 avec constitution de partie civile devant le juge d’instruction, pour “complicité de diffamation publique envers un particulier”, pour des propos que Jean-Jacques Gandini a tenu lors d’une émission organisée par les médias indépendants de Montpellier, le soir du 20 mai 2021, alors qu’il rendait compte du suivi de l’audience du même jour devant le tribunal correctionnel de Montpellier, à laquelle il assistait pour le compte de la Ligue des Droits de l’Homme.

Durant cette audience, le doyen Philippe Pétel et Mme Patricia Margand, compagne du professeur d’histoire du droit Jean-Luc Coronel, étaient poursuivis pour “complicité de violences commises en réunion”, et ce dernier, ainsi que quatre autres co-prévenus pour “violences commises en réunion” à la suite de l’irruption peu avant minuit, le 22 mars 2018, d’un commando d’une dizaine de personnes, armées de planches cloutées et d’un taser, dans l’amphi A de la Faculté de Droit de Montpellier, pour en expulser violemment les occupants et en blesser plusieurs, dont certains gravement.

Les propos tenus le 20 mai 2021, et diffamants selon Alexandre Bellotti, étaient les suivants : “Le Président a clos la journée en lisant les procès-verbaux des victimes pour bien mentionner et rappeler que, l’air de rien en donnant des noms, et les noms notamment de Demaison, Bellotti et Vialla, que, par conséquent, il n’y a peut être pas tous les membres du commando ou éventuellement qui étaient présents.”

En septembre dernier, Me Gallon, l’avocat de Jean-Jacques Gandini, avait plaidé la relaxe. La justice lui a donné raison : Alexandre Bellotti est condamné à payer 1 000 euros à l’avocat montpelliérain ainsi qu’à Jude Mas, directeur de publication du média indépendant Montpelliérain La Mule du Pape, qui hébergeait l’émission où ont été tenus ces propos, pour abus de constitution de partie civile.

Un proche des Brigandes condamné

Deuxième affaire jugée en septembre dernier dont le délibéré était rendu ce jeudi 7 décembre : celle qui opposait Thierry C., un habitant de la Salvetat-sur-Agoût, dans les hauts-cantons de l’Hérault, qui dénonçait sur son blog les agissements de la secte installée dans sa commune, les Brigandes, à Nicolas M., un homme qui se disait proche de cette mouvance.

Il avait tenu des propos diffamants envers Thierry C. dans une vidéo. Nicolas M. a été condamné à 1 000 euros d’amende délictuelle plus 1 000 euros au titre de l’article 475-1 du code pénal.

Le président de la Ligue du Midi à la barre

Après ces délibérés, l’affaire la plus attendue de l’après midi a enfin été jugée après 15 renvois. Les faits datent du 17 mai 2019 : La Ligue du Midi, groupuscule raciste et violent souhaite organiser une conférence de presse sur les travaux de la commission d’enquête parlementaire sur la lutte contre les groupuscules d’extrême droite, qui devait se tenir au Club de la presse.

Celle-ci étant annulée au dernier moment, les identitaires se rabattent sur un restaurant voisin. Ils sont alors accompagnés par Pierre Cassens, rédacteur du site d’extrême-droite Riposte Laïque. Sophie Mazas, avocate et membre de la Ligue des droits de l’Homme 34, arrive à cette conférence de presse improvisée et raconte avoir été copieusement insultée de “garce”, de “pute”, ou encore “elle sourit pas quand elle se fait lever”.

Des propos imputés à Olivier Roudier, président de la Ligue du Midi, et documentés par une vidéo sur laquelle “un homme portant un béret parle à Sophie Mazas”. “Beaucoup de gens portent un béret à la Ligue du Midi” a répondu Olivier Roudier à la barre, niant les faits.

. Sur le site de riposte laïque, Pierre Cassens, contre qui Sophie Mazas a également porté plainte, prolonge : “Elle pourrait avoir du charme si elle prenait soin de sa coiffure[…] A son âge elle mériterait de perdre quelques kilos”. Il a également écrit, en substance, qu’il connaissait beaucoup d’avocats, mais que Sophie Mazas avait l’air “négligée”, et ressemblait plus à une militante qu’à une avocate, censée avoir une certaine prestance.

“L’injure sexiste est caractérisée, il y a du mépris, de l’invective, car ma cliente est sortie de l’image de la femme que se fait Mr Roudier”, a plaidé Me Leblond, l’avocate de Sophie Mazas. “Quand on traite quelqu’un de pute, c’est l’intégralité des femmes qui est visée. C’est le comble du phallocentrisme.”

Quant aux propos de Pierre Cassens, Me Leblond a également réagit vivement : “Quel rapport entre sa tenue et sa qualité d’avocate ? Et moi, suis-je suffisamment bien coiffée pour plaider devant vous aujourd’hui ? Tous ces propos sont la face immergée d’une idéologie.” Elle a demandé un euro de dommage et intérêts pour sa cliente et 2 000 euros à Olivier Roudier ainsi qu’à Pierre Cassens au titre du code de procédure pénale.

La procureure, quant à elle, s’en est “remis à la sagesse du tribunal”, et n’a fait aucune réquisition.

“Prescription”

L’avocat de Pierre Cassens, a plaidé la “liberté d’expression et le style polémique et humoristique” de son client, et a fait valoir des délais de prescription, vu l’ancienneté de l’affaire, renvoyée 15 fois.

“Sophie Mazas a entravé la liberté d’expression en allant perturber un débat. Elle s’est comporté comme une militante, pas une avocate. En ce qui concerne la description faite par Mr Cassens, oui, c’est un jugement de valeur, mais pour lui, un avocat a une certaine prestance, c’est quand même une profession de robe. Aujourd’hui, Sophie Mazas a besoin d’un jugement pour faire dissoudre la Ligue du Midi, elle instrumentalise la justice à des fins politiques”, a-t-il déclaré.

L’avocat d’Olivier Roudier, a quand a lui souligné le fait que l’enquête n’avait pas été réalisée dans cette affaire : “Il n’y a pas eu d’acte d’instruction. On parle d’une vidéo, mais elle n’a pas été jointe au dossier et il n’y a pas eu de constat d’huissier sur cette pièce. Et on ne sait même pas si Sophie Mazas était présente quand on regarde ces images.” Il a demandé la relaxe du président de la Ligue du Midi.

Le délibéré sera rendu le 7 mars prochain.

Elian Barascud


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