La Gazette de Montpellier reçoit 87 200 euros de la Ville pour créer un supplément sur “La Ville à hauteur d’enfant”

Le Poing Publié le 27 mars 2024 à 19:03 (mis à jour le 28 mars 2024 à 14:09)
La Gaztte de Montpellier est un hebdomadaire qui parait le jeudi. ("Le Poing")

L’information vient de la synthèse des décisions du Conseil municipal du 26 mars. La Ville de Montpellier a attribué un marché relatif à la création et la diffusion d’un supplément de 48 pages à l’hebdomadaire du jeudi au sujet dun dispositif international dans lequel la majorité PS s’inscrit. Chronique d’une presse aux ordres

On vous le dit souvent, mais la presse va mal. Récemment, on évoquait l’arrivée d’un nouveau média contrôlé par le milliardaire Vincent Bolloré dans le Clapas (qui a nommé à sa tête un ancien de Midi Libre). Un peu avant, c’était justement Midi Libre ainsi que la Gazette qui concluaient un partenariat (allant de la publicité et d’un stand sur place pour le premier et à des places à faire gagner pour le second) avec un salon du bien-être aux invités sulfureux (auteur homophobe, médecin antivaxx, “journaliste” conspirationniste, “thérapeutes” soupçonnés de dérives sectaires…). Le Poing a d’ailleurs contribué, par ses révélations, à faire revenir Midi Libre sur ce partenariat.

Nouvel élément, tiré de la synthèse des décisions du Conseil municipal du 26 mars, qui témoigne de la déchéance de l’écosystème médiatique : La Gazette de Montpellier vient de se voir accorder un marché public par la Ville de Montpellier, via la direction de la communication, pour la “Conception, réalisation, impression et la diffusion d’un supplément de 48 pages ayant pour thème “la Ville à hauteur d’enfants” pour un montant de 87 200 € HT” et pour une durée de 6 mois à compter de sa date de notification.”

La “Ville à hauteur d’enfant” est un réseau international, dont Montpellier se targue d’être la première Ville de France à en faire partie. Ce dispositif promet de donner moins d’espace à la voiture en ville pour sécuriser l’espace public pour les enfants, et d’associer ces derniers à la prise de décision publique en écoutant leurs propositions et revendications. Présenté comme ça pourquoi pas, mais de là à payer un média local pour en faire 48 pages…

Dans un article que nous avions écrit en avril 2021, intitulé “La Blazette de Montpellier”, nous évoquions déjà cette promiscuité du titre avec les pouvoirs locaux : “Il suffit de feuilleter les pages : la communication institutionnelle, celle dont décident les élus et grandes structures d’influence, se déversent comme d’un robinet, dans les pages de ce qui a le culot de vouloir se faire prendre pour encore indépendant. Difficile d’évaluer combien de millions d’euros sont ici en cause. « Entre un ou deux dans l’année ? » se demande l’un des journalistes de l’hebdomadaire. […] Pourris d’idéologie de la consommation, pourquoi pas sur le versant du luxe, particulièrement voué au marché immobilier, les volumineux suppléments publicitaires se succèdent. Il faut encore compter avec les éditions événementielles clés en main, qui se vendent autour de 10 000 euros, aux institutions politiques du coin, vantant leurs journées des jardins ici, ou leur Comédie du livre là. Ainsi se tisse un réseau de connivences politico-commerciales, entre rédactions et services de communication.”

Quitte à pousser la réflexion jusqu’au bout, on pourrait se demander à quoi sert encore le magazine “Montpellier en commun” et son supplément “Montpellier Métropole en commun”, mensuel de communication institutionnelle devenu bimestriel, tiré à 280 000 exemplaires pour la Métropole et 180 000 exemplaires pour la Ville, quand La Gazette fait déjà grosso modo le même boulot. Ou inversement…
(A noter qu’on n’a pas encore réussi à savoir combien la création et la diffusion de ce magazine coûtaient, les chiffres ne nous ayant pas été communiqués malgré nos demandes).

Face à ce marasme médiatique ambiant et aux difficultés de financements qui touchent tout ce secteur, il existe encore, et heureusement, une presse réellement indépendante qui ne signe pas de partenariat avec des salons douteux et qui ne reçoit pas d’argent de la main de la municipalité qu’elle entend mordre. Alors pour la faire perdurer, soutenez Le Poing et abonnez-vous !

Nos articles sont gratuits car nous pensons que la presse indépendante doit être accessible à toutes et tous. Pourtant, produire une information engagée et de qualité nécessite du temps et de l’argent, surtout quand on refuse d’être aux ordres de Bolloré et de ses amis… Pourvu que ça dure ! Ça tombe bien, ça ne tient qu’à vous :


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