Les luttes sociales post-confinement se préparent à Montpellier : assemblée en ligne le 1er mai

Le Poing Publié le 24 avril 2020 à 13:10 (mis à jour le 24 avril 2020 à 15:01)
Banderole brandie sur la place de la Comédie de Montpellier lors de l'acte 10 des gilets jaunes, le 19 janvier 2019

Gilets jaunes, féminisme, écologie, retraite : ces dernières années sont marquées en France par une ébullition sociale sans précédent, qui s’est souvent traduite à Montpellier par des manifestations-monstres et des émeutes jusqu’à la tombée de la nuit. Faisons en sorte que le combat social ne soit pas un vestige du passé, mais un espoir d’avenir.

L’urgence comme prétexte aux lois anti-sociales

Le confinement, contraint par la destruction de l’hôpital public et l’incapacité des autorités à fournir des masques et des tests, a pris tout le monde de court. Profitant de cette sidération, le conseil des ministres a dégainé le 49-3 pour passer en force la réforme des retraites, finalement retirée au profit de mesures encore pires condensées dans un « état d’urgence sanitaire » : remise en cause des 35 heures, des congés payés, du repos dominical, généralisation des audiences en visio-conférence, rallongement des délais de détention provisoire, etc (en savoir plus ici et ). Le gouvernement a sciemment instrumentalisé l’urgence sanitaire pour imposer des lois sécuritaires et anti-sociales dans les tiroirs depuis longue date. En 2015, déjà, dans la foulée des attentats, l’État avait décrété un « état d’urgence » dont les principales dispositions ont finalement été transcrites dans le droit commun, comme les perquisitions sans juge d’instruction.

Gestion policière d’une crise sanitaire

À défaut de distribuer des masques, l’État français déploie drones et policiers pour dresser des contraventions, souvent arbitraires voire absurdes, parfois accompagnées de violences policières. Les forces de l’ordre, dont on se demande quel lointain rapport elles entretiennent avec l’ordre, ont procédé à 15,5 millions de contrôles, et ont dressé plus de 915 000 procès-verbaux. Derrière ces chiffres, des réalités parfois dramatiques. À Béziers, un homme est décédé au commissariat après un contrôle de confinement. À Montpellier, le membre d’une association humanitaire distribuant de la nourriture aux plus démunis s’est vu infliger 5 jours d’ITT par des policiers au motif qu’il ne respectait pas le confinement, alors qu’il était muni d’une attestation dérogatoire, en ayant coché le motif « participation à des missions d’intérêt général », le tout accompagné d’un ordre de mission nominatif signé du responsable local du Secours populaire. À Toulouse, une femme a été placée en garde à vue pour avoir brandi sur son balcon une banderole portant le message «  Macronavirus : à quand la fin ? ». Les témoignages d’habitants des quartiers populaires subissant des contrôles humiliants et violents se multiplient, ce qui explique largement le regain de tension dans les banlieues. Dans les prisons, c’est l’explosion : une quarantaine de pénitenciers ont été touchés par des mouvements de contestation, notamment à Béziers, où un surveillant a sorti un fusil à pompe, et à Carcassonne, où les équipes régionales d’intervention et de sécurité ont frappé un détenu à terre. Comble de l’indécence, l’État impose aux prisonniers de fabriquer des masques, dont 20% sont réservés… au ministère de l’Intérieur ! Par pur dogmatisme, la fermeture des centres de rétention administrative n’est toujours pas actée. Les raisons d’en découdre sont nombreuses. Ils doivent rendre des comptes.

Assemblée générale en ligne le 1er mai

Pour que confinement ne rime pas avec isolement, l’association montpelliéraine « Le Barricade », au service des luttes sociales, organise des débats en ligne depuis plusieurs semaines pour éclairer les enjeux actuels (le prochain aura lieu ce samedi 25 avril à 19h). Le succès technique de ces réunions dématérialisées a convaincu l’association d’organiser une assemblée générale dématérialisée le 1er mai à 18h, parce que « la crise que nous traversons tous et toutes n’est pas seulement une crise sanitaire, c’est aussi une immense crise sociale qui débute », et pour « préciser nos exigences, imaginer des moyens d’action pour les obtenir, et façonner le “monde d’après” ».

Manifestation le 16 mai ?

Autre initiative relayée par la page facebook « Montpellier en Résistance » : l’appel à un « déconfinement réfractaire à l’État autoritaire » qui prendrait la forme d’une manifestation le 16 mai à 14h sur la place de la Comédie de Montpellier, avec ce message clair : « le peuple uni pour une revanche populaire ! […] Innombrables sont les actualités mortifères et autoritaires de la politique libérale menée par l’État capitaliste en place, qui, dans un constant déni ne ressemble à plus rien d’autre qu’un État policier revendiquant son croissant despotisme. Pour les mort·e·s, les blessé·e·s, les exploité·e·s, les oppressé·e·s… Contre le grand capital et son État, pour le monde vivant, déconfinement de lutte, toutes et tous dans la rue ! » L’appel à manifester est « provisoire », la « date […] sera redéfinie ultérieurement », mais on peut mettre à profit de cette page facebook d’avoir déjà co-organisé de nombreux actes de gilets jaunes à Montpellier qui se sont bel et bien déroulés. Le Poing vous tiendra au courant.

La prévision de cette manifestation pose question : est-il bien raisonnable de se rassembler en ces temps de pandémie ? Ne serait-ce pas faire courir un risque sanitaire supplémentaire, à l’heure où de nombreuses voix s’élèvent pour critiquer le déconfinement du 11 mai jugé précoce ? Ces interrogations sont légitimes, mais pendant combien de temps l’argument sanitaire doit-il nous empêcher de lutter face à un État qui, lui, multiple les offensives ? Au regard de la dégradation sociale, sortir dans la rue ne serait-il pas un risque proportionné ? Si oui, faut-il généraliser le port du masque et inciter au respect de distances de sécurité entre les manifestants, comme cela s’est observé lors d’une manifestation en Israël (photo ci-dessous) ? Pour répondre à toutes ces questions, rendez-vous à l’assemblée générale du 1er mai !

2 000 Israéliens ont manifesté en respectant une distance de sécurité, à Tel-Aviv le 19 avril, pour s’opposer au Premier ministre Benyamin Netanyahou, inculpé pour corruption (capture d’écran d’une vidéo publiée par Le Parisien)

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